L'EXPROPRIATION
POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE

ESPACE PRATIQUE

Que faire en cas d'expropriation ? ...

Bien entendu, cette rubrique s'adresse aux propriétaires expropriés ou menacés d'expropriation.

Il leur est conseillé avant tout d'aller consulter l'article  « Expro Express - Tout sur l'expropriation ...  »

On s'enrichit rarement à l'occasion d'une expropriation (en principe en tous cas, côté exproprié), mais même si l'expérience peut être désagréable, voire parfois traumatisante, elle ne se traduit pas forcément par une catastrophe, notamment économique. Il faut savoir que la très grande majorité des acquisitions par les collectivités publiques s'effectuent par voie amiable : il est fréquemment avancé (généralement par l'administration, mais cela paraît vraisemblable) que les juridictions de l'expropriation n'ont à arbitrer le montant des indemnités que dans environ 10% des cas. En outre, au contraire des contentieux relatifs à l'exercice d'un droit de préemption, les opérations devant entraîner des expropriations sont le plus souvent annoncées longtemps à l'avance. Il n'y a donc pas d'effet de surprise et on peut s'y préparer.

L'attitude des collectivités publiques est très variée : certaines recourent fréquemment à l'expropriation, d'autres - la majorité - rarement ou même pas du tout, et l'expérience montre que la couleur politique des collectivités territoriales n'est pas à cet égard un critère de distinction déterminant.

Il convient en premier lieu de s'efforcer de suivre la progression du projet de l'administration. Lors de l'enquête d'utilité publique et de l'enquête parcellaire il est recommandé de prendre connaissance du dossier, de consulter les plans, même si on n'estime pas utile de faire des observations par écrit. On pourra aussi tirer son profit des réunions d'information, lorsqu'il en est organisé (généralement très tardivement, pour diverses raisons qui ne sont le plus souvent que de très mauvaises excuses). Ces réunions sont l'occasion de faire la connaissance d'autres personnes ayant les mêmes préoccupations, de recueillir et d'échanger des renseignements, et pourquoi pas de se grouper même de façon informelle.

La tactique administrative est bien connue, et pas forcément anormale. Elle consiste généralement à obtenir un certain nombre d'accords amiables avec les propriétaires. Ces accords seront ensuite opposés aux autres propriétaires et serviront de termes de comparaison produits devant la juridiction de l'expropriation. Ignorer les correspondances individuelles de l'administration et s'abstenir d'y répondre n'est pas forcément la meilleure tactique pour négocier. Cela peut même s'avérer catastrophique en cas de fixation judiciaire des indemnités. Peut-être vaut-il mieux y répondre après s'être concerté avec d'autres personnes ou avoir pris conseil d'un spécialiste ou d'un sachant.

Chacun doit décider de l'opportunité de traiter à l'amiable, et choisir le moment propice pour conclure un accord, le cas échéant. Il faut savoir qu'en cas de transaction amiable, on peut obtenir des compensations qui ne sont pas forcément négligeables, soit sous forme d'indemnités accessoires, soit sous forme de prestations en nature (celles-ci ne peuvent pas juridiquement être imposées par l'administration), par exemple des travaux qui sont exécutés lors de la réalisation de l'ouvrage public.

A moins qu'on ne soit guidé par des principes auxquels on tient particulièrement (défendre des principes est une position très louable, mais elle a fréquemment un prix élevé, en argent ou sous d'autres formes), il vaut mieux, avant de décider de choisir la voie judiciaire, en estimer le coût : celui d'un procès en expropriation peut être élevé (frais d'avocat et éventuellement d'expert, en première instance et, le cas échéant, en appel), et il convient de faire le bilan prévisionnel coût/avantages de l'opération, en sachant qu'un procès n'est jamais gagné d'avance, et que les juges n'accordent que des indemnités assez peu élevées au titre des frais d'instance "non répétibles" (Art. 700 du N.C.P.C.), généralement très inférieures aux frais d'avocat et d'experts . Si l'intérêt du litige est élevé on peut avoir des chances sérieuses de récupérer sa mise. Si au contraire il est faible, il faut envisager de limiter les frais, notamment en assurant sa défense soi-même, sachant que ce n'est pas facile, même pour quelqu'un connaissant bien la matière et la procédure et qui n'éprouve pas de difficulté à lire et à écrire un mémoire.

Le plus difficile, en effet, est de trouver des termes de comparaison susceptibles d'être opposés efficacement à ceux présentés par l'expropriant. Celui-ci n'a pas de difficulté à en produire : l'administration du Domaine, qui dispose de facilités d'accès au fichier immobilier tenu par les conservateurs des hypothèques, les lui fournit, et elle a généralement son propre fichier enrichi par les référence de ses propres acquisitions amiables ou forcées et les "déclarations d'intention d'aliéner" souscrites lors de ventes de biens soumis à un quelconque droit de préemption.

Il est bien sûr judicieux de vérifier personnellement la pertinence des termes de comparaison produits par l'administration, mais se contenter de les discuter devant le juge risque d'être d'une faible efficacité, et il préférable d'en opposer d'autres, étant observé que ceux-ci doivent être choisis de manière adéquate, sous peine de donner l'impression au juge qu'on le considère comme un faible d'esprit (il est par exemple vain de citer des ventes de lots de terrains à bâtir compris dans un lotissement en vue d'évaluer un terrain situé en zone inconstructible ou un très vaste terrain à urbaniser dont toutes les infrastructures - voies et réseaux divers - sont à réaliser.

Même un avocat dispose rarement de termes de comparaison, sauf ceux qu'il connaît au travers d'affaires qu'il a déjà plaidées ou de décisions judiciaires dont il s'est procuré la copie. En général, il fait appel à un expert immobilier, le plus souvent un expert-géomètre, pour les lui procurer. Les notaires rechignent à indiquer des références, au prétexte du secret professionnel, alors que toutes les mutations dont ils sont chargés font nécessairement l'objet d'une publicité.

En cas de difficulté, il ne faudra pas hésiter à utiliser les nouvelles dispositions qui obligent l'administration à communiquer certains éléments du fichier immobilier public ou permettent au juge d'ordonner une expertise.

Enfin, Si on décide d'adopter la voie judiciaire, autant prendre l'attache d'un avocat suffisamment tôt. Il peut en effet y avoir une opportunité de contester la D.U.P. ou l'arrêté de cessibilité, et les délais pour y procéder sont très brefs.

Le choix d'un avocat peut s'avérer délicat : une faible proportion connaît suffisamment le droit de l'expropriation. Un avocat excellant dans certaines matières peut être incompétent en matière d'expropriation. Un avocat sérieux qui aurait des connaissances trop sommaires dans ce domaine orienterait normalement le client vers un confrère spécialisé. La consultation de la liste des avocats inscrits au conseil de l'ordre peut fournir de bonnes indications puisque désormais certaines spécialités peuvent être indiquées lorsque le praticien bénéficie d'une notoriété suffisante.

Il faut toujours avoir à l'esprit qu'une négociation bien menée est toujours préférable à un procès long et coûteux. Mais il est aussi des circonstances où l'instance judiciaire est la seule issue, que la cause en incombe à l'expropriant ou à l'exproprié.

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... ou en cas de préemption ?

Sauf dans certaines circonstances où le propriétaire peut s'attendre à ce que la collectivité publique exerce son droit de préemption (ce sera le cas par exemple fréquemment à l'intérieur des "espaces naturels sensibles des départements), le délai très bref dans lequel le titulaire du droit doit se prononcer laisse peu de temps pour anticiper.

Les considérations développées ci-dessus valent aussi en matière d'instance judiciaire en fixation du prix d'un bien préempté. S'y ajoutent les quelques particularités suivantes.

- Le propriétaire a toujours la ressource de renoncer à l'aliénation si le prix fixé en dernier lieu ne lui convient pas, en attendant des jours meilleurs. Si la collectivité décide par la suite d'exproprier, le propriétaire gagne au moins l'indemnité accessoire de remploi qu'il ne perçoit pas en cas de préemption(sauf application possible de dispositions restrictives).

- Il peut être judicieux de rappeler à la personne chargée d'établir la déclaration d'intention d'aliéner (DIA), généralement un notaire, de mentionner toutes les conditions de la vente, notamment les honoraires de négociation et le nom de leur bénéficiaire, au besoin en renvoyant à un document séparé qui sera annexé à la DIA. Si on a oublié quelque chose d'important, on peut toujours annuler la déclaration (on parle de "retrait de DIA"), et en notifier immédiatement une nouvelle rectifiée.

- Les conditions de régularité de la procédure sont très contraignantes, plus spécialement en matière de délais, et la sanction est presque inéluctablement la perte du doit de préemption pour la collectivité publique. Aussi, celle-ci a tout intérêt à se préparer à rédiger son mémoire en fixation du prix dès qu'elle décide d'exercer son droit de préemption, sans attendre la réponse du propriétaire.

- Il convient ici de signaler les détournements commis par certaines communes de la procédure applicable en matière de droit de préemption urbain dans le seul but de faire pression sur le vendeur afin de le persuader de baisser son prix. C'est précisément pour tenter de faire échec à ce genre de pratique visant à la régulation du marché immobilier local, et le plus souvent désapprouvée par les commentateurs (et dont le mécanisme peut d'ailleurs rappeler assez celui de l'extorsion), qu'une obligation de consigner a été imposée par une loi du 13 juillet 1991. L'insuffisance de justification du motif invoqué au soutien de la décision de préemption est sanctionnée par l'annulation de l'acte prononcée par la juridiction administrative lorsqu'elle est saisie, mais la durée et le coût des procédures administratives et judiciaires que le propriétaire doit alors supporter sont des contraintes et des obstacles importants pour celui-ci alors que les sanctions prononcées par les tribunaux à l'encontre de la collectivité publique sont jugées majoritairement peu dissuasives.

Il convient de signaler qu'un rapport du Conseil d'Etat d'avril 2008 sur le droit de préemption laisse augurer une refonte de ce droit dans un avenir qui pourrait n'être pas trop éloigné (se reporter à la page "Actualité" pour plus de précisions).

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